Trafic de tabac & d'alcool
Le silence assourdissant de Big Tobacco face au trafic de cigarettes

le
Par
Illicit Trade
Alors que les cigarettes illégales importées de Chine et d’Europe de l’Est inondent le marché, journalistes et politiques questionnent l’inaction des majors face au phénomène et s’interrogent sur les moyens à mettre en œuvre afin d’endiguer ce fléau.
Mi-juillet, des policiers du commissariat de la Courneuve (Île-de-France) ont démantelé un réseau de trafic de cigarettes. Ils ont mis la main sur la bagatelle de 25 000 paquets importés de Chine par la Belgique. Cette information remet sous le feu des projecteurs les dernières révélations d’une vaste enquête menée par le consortium de journalistes OCCRP sur China Tobacco.
Ménager les vieilles alliances
Le géant du tabac de l’empire du milieu (45% de la production mondiale), qui jusqu’ici se cantonnait au marché chinois, commence à lorgner sur l’international. Dans ce contexte, les journalistes pointent du doigt des pratiques et conflits d’intérêt entre cette même entreprise et l’État Chinois. Les deux entités partagent le même site Internet que l’autorité nationale de régulation du marché, et seraient à la tête de ce vaste trafic de cigarettes à l’étranger, dénoncent les enquêteurs.
Ladite enquête interroge aussi l’ambivalence de l’industrie à l’égard de la contrefaçon et de la contrebande. En temps normal pas avare de lobbying, Big Tobacco (Philip Morris International (PMI), British American Tobacco, Imperial Brands et Japan Tobacco International) reste étonnamment silencieux face à ces pratiques, s’étonnent les journalistes.
Pour ces derniers, il ne fait aucun doute que le géant du tabac ménage la multinationale chinoise qui compte comme partenaires historiques certaines majors. Dans un article de janvier 2017, Reuters rappelait par exemple que PMI travaillait depuis 2005 avec China National Tobacco Corporation (CNTC) pour la fabrication de Marlboro dans l’Empire du milieu. Tout comme British American Tobacco depuis 2013 et Imperial Brands depuis 2017.
Cigarettes illicites : la récidive
En la matière, les majors n’en sont pas à leur coup d’essai. Des études ont montré l’explosion des « illicit whites », ces cigarettes de marques produites en Europe de l’Est (Moldavie, Ukraine et Biélorussie) qui ont inondé le marché européen à partir de 2007 et ce, en dépit de toute autorisation de commercialisation. Et pour cause, d’après les conclusions d’une enquête menée par un journaliste biélorusse en exil, Evguéni Medvedev, « PMI, BAT et JTI disposeraient de partenaires commerciaux en Biélorussie impliqués dans la contrebande de cigarettes vers l’Union européenne, notamment en fournissant les fabricants biélorusses en tabac brut ».
Un coût social immense
Si, a priori, les géants du tabac rechignent à se saisir du problème, restent les États qui subissent de plein fouet les effets de ce commerce illicite. Mais entre politiques contre-productives et incomplètes, les solutions viables peinent à émerger. En France, dans sa stratégie décennale de lutte contre le cancer, le président de la République Emmanuel Macron se prend à rêver des premières générations sans tabac. Pour y parvenir, l’État mise sur une fiscalité toujours plus désavantageuse envers les cigarettiers.
Mais cette stratégie a ses limites, explique dans une tribune publiée dans Marianne, François-Michel Lambert, député des Bouches-du-Rhône et fondateur du parti « Liberté écologie fraternité ». « En augmentant les prix sans régler le problème du commerce parallèle, on continue à jouer le jeu des cigarettiers qui gagnent sur les deux tableaux en voyant leurs profits grimper en flèche sur le marché du trafic illicite », assure le député. A ce jour, près du tiers des cigarettes fumées en France est issu du commerce parallèle (contrebande et trafic transfrontalier), alors même que « ces cigarettes de contrebande sortent, directement ou indirectement, des usines des cigarettiers. »
« Aujourd’hui, les majors fournissent près de 3 milliards de cigarettes au Luxembourg tous les ans, alors que seules 600 millions y sont consommés. Même constat en Andorre (850 millions de cigarettes pour une consommation interne de 120 millions) », note le député. Quand en France, 40 milliards de cigarettes sont livrés chaque année, alors qu’elles devraient être 55 milliards pour répondre à la demande.
Résultat : un manque à gagner fiscal de 5 milliards d’euros par an en France et de 17 milliards d’euros pour les États membres de l’Union Européenne. Alors que le coût social du tabac atteint les 120 milliards d’euros par an, les recettes fiscales sur le tabac ne rapportent « que » 16 milliards par an.
Améliorer la traçabilité des cigarettes
Pour endiguer le phénomène, le député évoque le Protocole de l’OMS « pour éliminer le commerce illicite de tabac ». François-Michel a récemment déposé une proposition de loi. Il explique : « le Protocole propose ainsi d’imposer des quotas de livraison de tabac par pays basés sur la consommation domestique (Article 7) et d’exiger la mise en place d’une traçabilité strictement indépendante à la fois des contenants de tabac (étiquetage ndlr) ainsi que des équipements permettant sa fabrication. » Cette stratégie vise à empêcher les cigarettiers de surproduire et de surapprovisionner les pays où la fiscalité est plus avantageuse, et ainsi à limiter le commerce parallèle. Ce système de quotas, prévu à l’article 7 du Protocole, doit s’accompagner d’un système indépendant de traçabilité pour que les données relatives au commerce et à la consommation du tabac soient directement sous le contrôle et utilisés par les autorités publiques compétentes, mais ce n’est aujourd’hui pas le cas du système européen de traçabilité.
Ces décisions, taxation comprise, devraient aussi s’appliquer aux nouveaux produits du tabac comme les cigarettes électroniques. Dans une publication datée de juillet 2021, l’OMS met en garde contre leur prolifération, et leurs effets potentiellement nocifs. « L’OMS s’inquiète de constater que les enfants qui recourent à ces produits sont jusqu’à trois fois plus susceptibles de consommer des produits du tabac par la suite. L’Organisation recommande aux gouvernements de mettre en œuvre des règlements visant à empêcher les non-fumeurs de commencer à les utiliser », intime-t-elle.
En plus du projet de loi déposé à l’Assemblée nationale, rendez-vous est pris en 2022. Date à laquelle les parlementaires européens réviseront la Directive des Produits du Tabac.
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Les autorités biélorusses et polonaises ont mis fin à un réseau de contrebande de cigarettes international avec l’aide d’Europol
Une douzaine de suspects ont été arrêtés par les autorités des deux pays. Ils sont présumés appartenir à un réseau de contrebande de cigarettes de grande ampleur. Ces trafiquants opèrent sur le territoire des deux pays, mais peut-être aussi à une échelle européenne. Ces derniers étaient déjà sous le coup d’une enquête aux Pays-Bas, en Espagne et au Royaume-Uni selon Europol.
Contrebande de cigarettes à travers le continent
En plus d’avoir retracé les échanges en cryptomonnaies servant à blanchir leur argent la police a aussi réussi à effectuer d’autres saisies. Des lingots d’or et d’argent ont été retrouvés ainsi que des véhicules de luxe et des quantités d’argent en liquide considérables. Au total on estime que la valeur des saisies avoisinerait les deux millions d’euros. Près de 200 agents de police de Pologne ont participé à l’opération ayant permis ces saisies.
Les informations fournies par les agences de renseignements ont révélé que le réseau de contrebande de cigarettes servait à financer d’autres activités au sein du réseau. Europol n’a pas donné d’indications sur les éventuelles autres activités illégales du groupe. On sait cependant au moins qu’une partie de leur opération impliquait du trafic de drogue. Les trafiquants utilisaient principalement des investissements immobiliers et des cryptomonnaies pour blanchir leurs revenus.
Une source de revenu majeur pour les États
La contrebande de tabac est une des principales fraudes aux taxes frontalières dans l’Union européenne. Ceci prive les pays membres de revenus importants pour financer des projets publics en tout genre. Pire encore ces revenus financent les activités de groupes criminels et posent des problèmes de sécurité publique et nationale.
Une étude de 2022 par KPGM révèle que 35,5 milliards de cigarettes de contrebande ou de contrefaçon ont été consommées en Europe en 2021. Ceci représente une perte nette de 10,4 milliards d’euros en taxes à travers le continent. Ceci représente une augmentation de 22 % depuis l’année dernière. On estime aussi que 8,1 % des cigarettes consommées en Europe sont d’origine illégale. La Pologne et la Biélorussie avaient observé une baisse notable de leur consommation l’année d’avant. Cependant cette baisse pourrait n’être due qu’à la pandémie.
Analyses
A l’ombre du Qatargate, la Commission européenne continue de satisfaire le lobby du tabac

le
1 mars 2023
Salutaire, la déflagration du Qatargate ne doit pourtant pas laisser croire que les institutions européennes se sont lancées dans un véritable aggiornamento. Alors que cette affaire, spectaculaire par les montants en jeu, les personnalités impliquées et les images de liasses de billets diffusées dans la presse, fait l’objet d’une importante couverture médiatique, Bruxelles peine à apporter une réponse coordonnée et efficace au fléau de la corruption, beaucoup plus diffus et systémique que ne le laisse penser ce coup d’éclat. Les atermoiements entourant la décision d’augmenter les taxes sur les produits du tabac tendent à le démontrer.
Le Qatargate, l’arbre qui cache la forêt ?
En décembre dernier éclatait le scandale du Qatargate, ébranlant les institutions européennes, et plus particulièrement le Parlement européen, confronté aux dévastatrices photos des montagnes de cash retrouvées notamment chez sa vice-présidente Eva Kaili et chez l’ancien eurodéputé Pier Antonio Panzeri. Cette affaire, dénonçait alors le député européen Raphaël Glucksmann, est le symptôme « de la faiblesse des règles et du manque de détermination politique de lutter contre ce fléau à Bruxelles ». Depuis, la présidente du Parlement européen Roberta Metsola et les groupes politiques multiplient les propositions pour tenter d’atténuer la défiance des citoyens européens, à un peu plus d’un an des prochaines élections européennes.
L’erreur la plus funeste serait de tenter de circonscrire cette affaire à quelques cas isolés de députés européens et aux manœuvres d’un Etat du Moyen-Orient. Le hashtag #Qatargate, qui continue de fleurir sur les réseaux sociaux, traduit mal l’ampleur d’un phénomène, la corruption, qui gangrène les institutions européennes sous diverses formes.
Car le mal bruxellois est beaucoup plus ancré, beaucoup plus profond, et ne peut être résumé aux valises de billets qui ont été exhibées. « La corruption, ce ne sont pas seulement les valises de billets, c’est aussi le conflit entre l’intérêt particulier et l’intérêt général, la colonisation du système de décision publique par des puissances privées ou des Etats étrangers » rappelle opportunément le député européen Raphaël Glucksmann. Qui appelle de ses vœux une indispensable moralisation des institutions européennes.
Un report de la révision de la directive décidée unilatéralement par la Commission européenne… et par l’industrie du tabac ?
Pendant le scandale, le business as usual continue en effet sur fond d’arrangements entre la Commission européenne et certains lobbies, dont celui du tabac. Ainsi, la lecture, toujours instructive, des « questions parlementaires » sur le site du Parlement européen, nous permet de comprendre, grâce à une interpellation de la députée européenne Anne-Sophie Pelletier, pourquoi la révision de la directive 2011/64 sur la taxation des produits du tabac, qui devait commencer en octobre 2022, est toujours au point mort.
Pour rappel, la directive 2011/64/UE sur la taxation des produits d’accises, dont le tabac, vise notamment à imposer une taxation minimum des produits du tabac dans les 27 Etats membres de l’Union européenne pour contraindre les fabricants de tabac à augmenter les prix de leurs produits, et concrétiser l’équation posée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui considère qu’une hausse des prix de 10% entraine une baisse de la consommation de tabac de 4%.
Le prix restant l’indéniable meilleure mesure antitabac, on sait, comme le rappelle la députée européenne LFI dans sa question écrite, que l’industrie du tabac s’oppose farouchement à la révision de cette directive droits d’accises, qui ne pourrait se concrétiser que par une hausse des taxes, et par un élargissement de cette taxation aux nouveaux produits du tabac que sont le tabac chauffé, les cigarettes électroniques, les puffs ou autres sachets de tabac dits « snus ».
En rappelant que le tabagisme est responsable chaque année de 700 000 décès en Europe, et d’un coût pour les finances publiques de plusieurs centaines de milliards d’euros (120 milliards d’euros par an uniquement pour la France selon l’Alliance Contre le Tabac – ACT ), il semblait exister un consensus à Bruxelles pour concrétiser l’objectif que s’est fixé l’UE d’une « génération sans tabac » à l’horizon 2030, le Parlement européen ayant, comme le rappelle Anne-Sophie Pelletier, exigé cette révision, notamment après le Rapport de la commission spéciale de lutte contre le cancer, animée par Véronique Trillet-Lenoir, députée européenne Renew du Président Macron.
Le Parlement européen face au front commun Commission européenne/industrie du tabac
Cette décision de repousser la révision de cette directive est une nouvelle illustration de la divergence de vue entre la Commission européenne, qui reste très perméable aux intérêts du lobby du tabac, comme on l’a vu fin 2022 avec la dénonciation de l’Affaire Dentu / Jan Hoffmann, ce conflit d’intérêts sur la traçabilité des produits du tabac dénoncé par la députée européenne Michèle Rivasi et Le Canard Enchaîné, et le Parlement européen qui semble rester intransigeant face aux pressions des fabricants de tabac, comme l’avaient montré ses votes contre le renouvellement de l’accord de coopération UE / Philip Morris en mars 2016 et pour la ratification du Protocole de l’OMS « pour éliminer le commerce illicite du tabac » en juin 2016, les deux fois contre les pressions, étonnamment concomitantes de la Commission européenne et de l’industrie du tabac.
Anne-Sophie Pelletier évoque d’ailleurs ce Protocole de l’OMS dans sa question écrite, dont la mise en œuvre est considérée comme le corollaire indispensable de toute hausse des prix du tabac car il empêche les fabricants de tabac d’organiser le commerce parallèle pour saper les effets de la hausse des prix. Ce traité international devrait également être introduit dans la révision de la directive droits d’accises, mais également dans celle de la Directive 2014/40/UE relative aux produits du tabac dite Tobacco Products Directive (TPD), dont on attend aussi le lancement, mais à laquelle le lobby du tabac s’oppose également, en dépit des positions des organisations non gouvernementales de santé qui réclament le changement du système pour en assurer l’indépendance à l’égard des industriels, et des experts qui se ont indignés de la potentielle mainmise des industriels sur ce système censé les contrôler. Les eurodéputés vont devoir se montrer fermes et solidaires face au front commun Commission européenne/industrie du tabac.
Analyses
Trafic de tabac : le rapport KPMG biaisé selon le Comité National Contre le Tabac
le
19 juillet 2022
Le 23 juin 2022, l’industrie du tabac présentait son étude annuelle sur le marché parallèle du tabac conduite par KPMG. Une semaine auparavant, l’ONG Comité National Contre le Tabac (CNCT) dénonçait à l’avance les résultats de cette étude et les conclusions qu’en tirent les cigarettiers. Explications d’une polémique sur fond d’énormes enjeux financiers pour les cigarettiers.
Le 15 juin 2022, le Comité National Contre le Tabac (CNCT) dénonçait par anticipation dans Les Echos le traditionnel Rapport annuel de KPMG sur le marché parallèle de tabac en Europe, commandité par l’industrie du tabac, rapport qui paraitra une semaine plus tard.
Données tronquées
Sans nier la réalité du marché parallèle, le CNCT dénonce deux biais dans l’élaboration de ce rapport : d’une part des données statistiques tronquées voire falsifiées, et d’autre part la « confusion sémantique » qu’entretient l’industrie du tabac via ce rapport annuel entre ventes légales hors réseau officiel de vente et commerce illicite (contrebande et contrefaçon).
Ce n’est pas la première fois que le CNCT accuse KPMG de « jouer » avec les données statistiques de ses propres études. Ainsi, en 2017, le CNCT montrait que KPMG avait modifié rétroactivement les données sur les marques blanches, les “Illicit Whites” pour servir les actions de lobbying d’alors des fabricants de tabac.
Contrefaçon et statistiques dopées
Cette année, ce sont les chiffres de la contrefaçon qui, à en croire le CNCT, semblent volontairement dopés dans l’étude de KPMG. Alors que jusqu’à présent une étude de Seita-Imperial Tobacco chiffrait la contrefaçon à 0,2%, elle deviendrait aujourd’hui le problème n°1 en Europe et dans le monde, avec des hausses de plus de 600%. Pas plausible selon le CNCT.
L’ONG dénonce également la pratique des fabricants de tabac qui sur-approvisionneraient certains pays à fiscalité plus douce, pays qui serviraient
Ces pratiques pourraient ressembler aux querelles habituelles entre lobby du tabac et associations antitabac. Derrière se cachent cependant des enjeux extrêmement importants pour le secteur du tabac. En tentant de montrer qu’elle est la première victime du marché parallèle, l’industrie du tabac essaie de se prémunir contre deux écueils : la hausse des taxes sur le tabac, et l’application du Protocole de l’OMS « pour éliminer le commerce illicite du tabac ».
Révision de la directive sur les droits d’accises en octobre 2022
Le débat sur la hausse des taxes sur le tabac va être au cœur de la révision de la directive sur les droits d’accises qui va débuter en octobre 2022 à Bruxelles. Habituellement, l’industrie du tabac milite pour le statu quo ou pour la hausse la plus faible possible, en mettant en avant le risque d’une explosion du commerce parallèle, et de la contrefaçon en particulier, ce qui explique pourquoi les données de KPMG ont été dopées sur ce point. L’industrie du tabac plaide donc en général pour une harmonisation fiscale au sein des 27 Etats membres de l’UE, en sachant pertinemment que cette mesure n’a aucune chance d’aboutir, les prix d’un paquet de cigarettes allant de 3€ en Bulgarie à 15€ en Irlande. Mais ce lien entre commerce parallèle et hausse des taxes n’est pas évident selon le CNCT : il serait même incorrect en particulier si des mesures fortes étaient adoptées pour empêcher les abus.
Traçabilité indépendante et quotas de livraison de tabac par pays
L’application du Protocole de l’OMS va, elle, être au cœur de la révision de la directive des produits du tabac qui sera discutée à Bruxelles après le renouvellement des membres du Parlement Européen de juin 2024.
Comme le constatent aujourd’hui les associations antitabac, le système européen de traçabilité opéré par des entreprises dont l’existence est associée au programme de traçabilité de l’industrie du tabac appelé Codentify, comme Inexto ou Dentsu, n’est pas conforme au Protocole de l’OMS. Contrairement à leurs affirmations ce que le Secrétariat en charge du suivi de l’application de la Convention a d’ailleurs critiqué dans un communiqué opposé aux auto-déclarations de conformité au Protocole, il ne présenterait pas les garanties d’indépendance impératives. Plus généralement, outre cette incompatibilité au droit, le système permettrait des erreurs de déclaration dans de nombreux Etats membres qui s’en sont plaints, erreurs listées par la Commission Européenne dans le rapport des experts en charge du suivi du système.
Dans sa communication du 15 juin 2022 pour lutter contre les trafics de tabac, le CNCT appelle d’ailleurs à mettre en place le Protocole de l’OMS via deux mesures fortes : une traçabilité indépendante des produits, ce qui n’est donc pas le cas aujourd’hui en UE, et des quotas d’approvisionnement par pays. Une proposition elle aussi inscrite dans le Protocole de l’OMS depuis 2012 déjà, mais toujours pas mise en œuvre jusqu’à présent, et qui mettrait fin immédiatement aux achats frontaliers.
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